Qu’on le déplore ou non, notre rapport au monde biophysique est désormais fermement médiatisé par la mesure et les données numériques. Véritable Janus, cette information dite « environnementale » nous contraint autant qu’elle nous libère et fait l’objet de controverses brûlantes. Vecteur de démocratisation là où elle permet aux populations de connaître les risques qui les concernent et de participer aux décisions environnementales, elle s’avère dangereuse lorsqu’elle renforce des situations de domination sociale, ou appauvrissante quand elle réduit notre compréhension du monde vivant à quelques variables chiffrées. Incapable de représenter la complexité de ce vivant et du rapport que tissent avec lui les humains, elle connecte autant qu’elle marginalise les êtres et les choses. Les enquêtes sud-américaines de cet ouvrage explorent ce que le numérique change aux façons contemporaines d’appréhender les problèmes environnementaux, à travers des récits qui racontent plusieurs tentatives de « mise en bases de données » de la nature au XXIe siècle. De la Pachamama andine au symbole global amazonien, des luttes populaires pour le droit à l’information aux velléités de régulation à distance de l’agrobusiness, des controverses sur la standardisation de nos rapports au vivant aux quêtes de souveraineté informationnelle, c’est à un bilan politique nuancé et complexe que le lecteur est convié.