Longtemps j'ai pensé que le portrait était un genre à éviter. Surtout pour un écrivain, qu'on ne devait pas rencontrer parce que tout était dit dans l'oeuvre. C'était dans l'esprit de l'époque. J'avais tort, bien sûr, mais j'ai mis du temps à m'en convaincre. Il fallait que les contraintes du métier m'y obligent. J'ai bientôt découvert la richesse de cet exercice dont je n'ai cessé depuis d'éprouver le charme.
Je me souviens encore de mes premières « visites au grand écrivain », intimidée, presque effrayée : de mon intrusion entre l'auteur et son oeuvre ; de la crainte d'être déçue par le décalage entre la prose et la parole ; ou de ne pas réussir à restituer la singularité de ces rencontres. Les doutes se sont dissipés, j'y ai vite pris plaisir.
Voici une promenade, toute personnelle, dans mes exercices d'admiration. Ils ne portent pas uniquement sur des écrivains, mais aussi sur des éditeurs, des comédiens, des hommes de culture... Au fil des pages et d'un portrait à l'autre se dessine ainsi tout un paysage qui aujourd'hui commence à s'éloigner, je m'en rends compte, non sans une certaine nostalgie ; un monde d'hier mais qui reste vivant parce qu'il continue à nous parler de ce que nous sommes toujours.