« Si l'éducateur est celui qui sait, si les élèves sont ceux qui ignorent, il incombe au premier de transmettre, comme en dépôt, son savoir aux seconds. Dans cette vision « bancaire » de l'éducation, les élèves sont vus comme des êtres d'ajustement. Mais plus ils s'emploient à archiver les dépôts qui leur sont versés, moins ils développent la conscience critique qui leur permettrait de s'insérer en sujets dans le monde.
Cette vision de l'éducation réduit le pouvoir créateur des élèves, stimule leur naïveté et non leur esprit critique et satisfait les intérêts des oppresseurs, qui maintiennent les masses aliénées à travers des mythes indispensables au statu quo : le mythe selon lequel tout un chacun, à condition de ne pas être fainéant, peut devenir un entrepreneur ; le mythe de l'héroïsme des classes oppressives comme gardiennes de l'ordre ; le mythe du droit de toutes et tous à l'éducation. »
Pour Paulo Freire, l'idée de projet éducatif est indissociable de celle de projet social. Le but de l'éducateur est de donner aux opprimés les moyens de construire une conscience claire de leur position, et de rechercher avec eux les moyens de transformer le monde. Écrit en 1968 au Chili, ce classique, traduit dans des nombreuses langues, irrigue la pédagogie critique partout dans le monde.