Les marches du temps
Quand Emmanuel Mounier (1905-1950) publie en 1931 La Pensée de Charles Péguy, il n'a pas encore fondé la revue Esprit dont on sait le rôle considérable qu'elle jouera dans les débats politiques et philosophiques à venir. Or cette référence à Péguy restera très forte chez les successeurs de Mounier à la tête de la revue.
Ne l'oublions jamais, Péguy est à l'origine un anarchiste, et ni sa conversion au catholicisme en 1908, ni son passage à une forme de patriotisme un peu plus tard ne rompront ce premier élan. L'écriture de Péguy, comme celle de Mounier, est toujours charnelle, toujours prise dans le plus concret de l'Histoire, toujours contenue dans la notion de personne.
C'est donc à un anarchiste mort pour la France après avoir reçu l'eucharistie que nous avons affaire.
Combattant virulent pour la justice dans l'affaire Dreyfus, très lié à Georges Sorel et opposant à Jaurès, Péguy avait tout pour devenir l'objet du premier livre de Mounier. En effet, Mounier trouva en lui les germes de ses propres engagements anarcho-socialistes, personnalistes et chrétiens.
Cette édition est précédée d'une étude sur le rôle de la philosophie de Bergson tant chez Péguy que chez Mounier, et enrichie d'un dossier : articles de Mounier sur Péguy, polémique de Mounier avec Henri M assis, réactions de penseurs contemporains comme Gabriel Marcel, Jean Guitton ou Jean Lacroix. Elle est suivie d'une importante bibliographie de Péguy par Mounier lui-même.