Décrire la psychologie des philosophes, ce n'est pas fouiller
dans leur vie pour exhiber leurs petits secrets. C'est plutôt constater
qu'entre les deux extrêmes d'une métaphysique de la durée
et d'une anthropologie de l'homme grec, une lignée de penseurs
initialement formés à la philosophie a fourni une contribution
décisive à l'histoire de la psychologie. C'est exhumer des entreprises
originales aussi méconnues que la psychologie historique,
objective, comparée d'Ignace Meyerson, ou la psychologie sociale
génétique de Philippe Malrieu, ressaisies dans leurs relations
concrètes. Mais c'est aussi prendre conscience que nombre de
grandes figures de la philosophie française ont croisé la route de
ces psychologues au point de retrouver, sans toujours le dire,
leur méthode, leur objet ou leurs concepts - comme l'ont fait
Jean-Paul Sartre et Michel Foucault. C'est enfin se rendre compte
que, par-delà l'opposition des structuralistes à la psychologie et
en marge des développements des sciences cognitives, il y a place
dans la pensée contemporaine pour ces hybridations «psychophilosophiques».