Injustement oubliée, la IVe République n'est souvent connue que par sa crise finale qui déboucha sur l'avènement de la Ve. Ses débuts, dans le sillage de la Libération, constituent pourtant l'une des périodes les plus folles de l'histoire contemporaine. Comme le Directoire après la Terreur, elle vit d'immenses fortunes s'édifier sur le crime et la corruption. Des carrières fulgurantes se bâtir sur l'imposture avant de s'effondrer dans la honte. Et même d'anciens collaborateurs parvenir au sommet de la hiérarchie judiciaire... grâce aux procès de l'Épuration !
À tous les étages de la société, le travestissement, le mensonge, la dissimulation deviennent alors les artifices communs pour s'adapter aux temps nouveaux, comme l'illustre le célèbre film de Jacques Audiard Un héros très discret.
De l'escroquerie consistant à s'inventer un passé de résistant jusqu'au cas - unique dans l'histoire parlementaire - d'un complice des nazis parvenant à se faire élire député sous une fausse identité, en passant par l'invention de faux complots et la dissimulation d'authentiques séditions, rarement le mensonge n'aura-t-il été élevé sur le pavois avec tant d'audace et, pour tout dire, pareille impunité !
C'est cette histoire jamais racontée, reconstituée à partir d'archives oubliées ou non encore consultées (en particulier celles de Jacques Foccart), que retrace La République des imposteurs. À l'heure où la défiance revient en force dans le débat public et où l'accusation de mensonge est celle que les Français lancent le plus volontiers au visage des « princes qui [les] gouvernent » (Michel Debré), ressusciter cette étrange période s'imposait. Eric Branca y parvient avec son brio coutumier.