Si hier, la rue apparaissait révolutionnaire, porteuse de changement,
aujourd'hui, elle voit s'exprimer des violences qui traduisent des
inégalités sociales et culturelles toujours plus fortes. Ainsi, dans une
démocratie abîmée par les chômages, les pauvretés et les racismes,
la rue reflète les formes de vulnérabilité et de résistance des sociétés
urbaines contemporaines.
La rue donne alors à voir les conséquences de la modernité d'un
monde de tensions et d'incertitude, où les individus gèrent à partir de
ressources différenciées les risques sociaux et où la question de la
confiance en l'Autre se pose à tout instant. Lieu de cultures et de
chevauchement des appartenances, la rue contient aussi des formes
plurielles de socialisation et de désocialisation, elle montre comment
des «exclus de l'intérieur» et des «inclus» se côtoient, s'évitent ou
entrent en conflit.
Enfin, si la rue traduit des processus d'individuation qui traversent
nos sociétés, simultanément elle montre comment certaines formes
de mobilisation collective traduisent, peut-être, le désir de recréer de
la confiance et de l'entente.