Il y a la forêt du flâneur, du fugitif, celle de l'indien, la forêt du chasseur, du garde-chasse ou du braconnier, celle des amoureux, des ornithologues, la forêt aussi des animaux ou de l'arbre, celle du jour et de la nuit. Mille forêts dans la même, mille vérités d'un même mystère qui se dérobe et ne se donne jamais qu'en fragments.
Tout comme il y a un paysage, un son, une saveur, un parfum, un contact, une caresse, pour déplier le sentiment de la présence et aviver une conscience de soi. David Le Breton explore les sens, tous nos sens, comme pensée du monde. Cette fois l'anthropologue se laisse immerger dans le monde afin d'être dedans et non devant. Il nous montre que l'individu ne prend conscience de soi qu'à travers le sentir, qu'il éprouve son existence par des résonances sensorielles et perceptives.
Ainsi tout homme chemine dans un univers sensoriel lié à ce que sa culture et son histoire personnelle ont fait de son éducation, chaque société dessinant une "organisation sensorielle" qui lui est propre.
Percevoir les couleurs est un apprentissage autant que d'entendre ou de voir. Toucher, palper, sentir dans l'étreinte ou la souffrance, c'est faire affleurer la peau et la pensée dans la concrétude des choses, c'est aussi se sentir, goûter et parfois même être dégoûté.
L'auteur se fait explorateur des sens et n'omet rien de nos attirances et de nos rejets. Proposant que l'on réfléchisse désormais au "Je sens donc je suis", il rappelle que la condition humaine avant d'être spirituelle est bel et bien corporelle.