La totalité comme complot
Poursuivant son enquête critique sur la culture postmoderne, Fredric Jameson s'attache ici à montrer que le motif du complot est, dans l'imaginaire contemporain, un point de cristallisation des tensions paranoïaques qui agitent nos sociétés. À l'heure de la colonisation définitive de la vie sociale par la marchandise, l'impossibilité où nous nous trouvons de nous représenter le « capitalisme-monde » trouve son expression dans la forme paranoïde du complot. Les films de complot, où le détective se trouve pris au piège d'une machination sans sujet dont les ramifications paraissent se perdre à l'infini, ou encore dans un complot si total qu'il semble n'avoir plus de référent (et d'ailleurs, y a-t-il effectivement complot ?), fonctionnent comme un analogon de notre cauchemar quotidien : ce système où l'on n'arrive jamais à en finir de rien, comme disait Deleuze à propos des sociétés de contrôle. Riche analyse filmique et contribution originale à la théorie politique, cet essai porte la « méthode » Jameson à son point d'intensité maximal.