Née en 1860 dans un contexte antijuif particulièrement tendu, tant en Orient (affaire de Damas en 1840) qu’en Occident (affaire Mortara en 1858), l’Alliance israélite universelle s’est rapidement imposée comme la version juive de la « mission civilisatrice de la France ». À travers son réseau d’écoles modernes s’étendant du Maroc à la Perse, elle a contribué à l’émancipation de la condition juive comme à la modernisation des communautés juives et plus largement de leurs pays d’accueil. Mais elle s’est également retrouvée prise dans une série de controverses – avec les rabbins qui l’accusaient de saper les valeurs traditionnelles, avec le sionisme naissant – et de fantasmes antisémites. À travers son prisme, c’est toute l’histoire complexe des relations entre l’Europe, le monde musulman et les Juifs qui se donne à lire et nous ouvre à un autre regard sur les problématiques contemporaines.
Georges Bensoussan, historien, est notamment l’auteur d’Une histoire intellectuelle et politique du sionisme (Fayard, 2002) ainsi que de Juifs en pays arabes. Le grand déracinement 1850-1975 (Tallandier, 2012).