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L’Histoire de ma vie peut être lue comme on le ferait d’un recueil d’anecdotes passionnantes, n’ayant de lien entre elles que les hasards de la succession du temps. Si la lecture se fait plus pressante, elle dévoile un écrivain qui compose son discours en même temps qu’il dessine son autoportrait. Casanova se montre alors aux prises avec les mêmes lancinantes questions : celle de la différence des sexes, celle de l’autorité, celle du temps. Il ne veut pas les résoudre en les prenant de front. Quand il s’y aventure c’est l’échec et, bientôt la descente dans le sordide et l’horreur. Il préfère le plus souvent fabriquer, pour les tourner et même pour ne plus les voir, des masques toujours plus sophistiqués et plus habiles, qu’il réussit même à dérober à l’attention du client. Alors qu’il se met sans cesse en avant, comme s’il tenait le premier rôle sur les planches qu’il ne peut quitter, il prend soin, dans le même temps, de nous égarer et de rendre invisibles les solutions de son énigme, insérées qu’elles sont dans la subtile architecture de son récit. Il nous faut l’écouter avec patience et le saisir, au détour des phrases ou des chapitres, dans ces détails qu’il laisse traîner comme par mégarde et qu’il recouvre par la rapidité de son style, de ses aventures et de ses voyages.