Le crépuscule de la raison
« Penser le désastre » est l'injonction première de la pensée confrontée à l'épreuve de la Catastrophe qui s'abattit sur les Juifs d'Europe durant la période hitlérienne. Penser le désastre, c'est, d'une part, comprendre pourquoi la Shoah a pu se produire dans cette Europe civilisée, pétrie dans l'idéal de la raison humaine et les valeurs du progrès et des Lumières ; et d'autre part, c'est penser la possibilité d'un avenir pour la philosophie. En effet, les penseurs de l'après-désastre ne peuvent faire l'économie de cette interrogation critique et radicale : est-il encore possible de philosopher ? Et si oui, comment faire ? Comment penser philosophiquement ?
Theodor Adorno, Max Horkheimer, Emmanuel Levinas et Walter Benjamin ont eu le courage, la force, l'acuité - parfois seulement le désespoir - de penser ce qui s'était passé. Mus par l'indignation et le désir de témoigner, ils ont ressenti l'urgence de confronter leur pensée avec le cri d'agonie des morts d'Auschwitz.