Fête du don et de la prodigalité, le potlatch constituait le
centre de la vie sociale et spirituelle des peuples aborigènes de
la côte du nord-ouest de l'Amérique. Il trouve son expression
plastique la plus fascinante chez les Kwakiutl de Colombie Britannique,
qui opposèrent une résistance farouche aux admonestations
du colonisateur canadien, préoccupé d'inculquer à
ses populations sous tutelle les principes de la morale économique.
A la suite d'une cérémonie de 1921 qui fut marquée
par d'exceptionnelles et quasi surréalistes distributions de biens
somptuaires, l'administration réagit avec vigueur, prononçant
des peines d'emprisonnement et confisquant un ensemble de
plusieurs centaines de masques et autres objets rituels qui s'en
allèrent dormir durant un demi-siècle dans les réserves des
musées d'anthropologie de l'est canadien.
Le présent ouvrage replace cette cérémonie flamboyante et
fatale dans l'histoire de l'institution du potlatch, et retrace les
efforts accomplis par les Indiens pour que le patrimoine dont ils
avaient alors été spoliés, et qu'ils percevaient comme un élément
essentiel de leur identité culturelle, leur soit restitué à
l'aube des années quatre-vingt, tandis que deux musées
étaient édifiés sur leurs terres pour accueillir les objets rapatriés.