Le père Joseph
Deux hommes incarnent la politique française au début du Grand Siècle : l'un, Richelieu, en fut l'artisan ; l'autre, le père Joseph, en fut la cheville ouvrière.
Leur objectif était simple : soumettre les Grands, les rebelles huguenots et les ennemis de la France pour étendre la gloire du roi Très-Chrétien.
Toute la vie de François Le Clerc du Tremblay fut placée sous le signe de la guerre. C'est ce que montre, grâce à l'exploitation d'archives inédites, vaticanes et surtout privées, le livre de Benoist Pierre, première biographie savante du capucin botté, depuis plus de soixante-dix ans.
Né en 1577, en pleines guerres de Religion, puis entré dans l'ordre des capucins en 1599 après son premier fait d'armes, le père Joseph fonde une méthode d'oraison et une congrégation de moniales dévouées au Calvaire, prêche la conversion pacifique des calvinistes dans le royaume et la paix chrétienne à l'étranger, dirige les missions contre les infidèles d'Orient et les « païens » d'Amérique. Mais il s'impose également comme l'homme du coup de force, par la croisade contre les Turcs, la guerre contre les citadelles protestantes et la réorganisation manu militari de l'Europe au profit de Louis XIII.
Cet héritier d'une petite noblesse de robe et d'épée illustre aussi les modes d'ascension des serviteurs de l'Etat, rouages indispensables d'un pouvoir en quête d'absolu. En reconstituant les réseaux sociaux et cléricaux, le mélange d'ambition et d'abnégation qui propulsent un homme d'Eglise et un mystique au sommet du pouvoir, Benoist Pierre éclaire le fonctionnement de l'Etat moderne et pose la question de sa sécularisation avant l'avènement des Colbert et autres Louvois.