L'oeuvre monumentale de Clifford Geertz comprend
des monographies empiriques et des essais
philosophiques, des recherches portant sur l'économie, la
politique, la parenté ou la religion. Une synthèse sur
l'islam, étudiée par tous les apprentis anthropologues,
des articles universellement lus sur l'analyse culturelle et
des exercices de critique littéraire dans la New York Review
of Books... Dans cet ensemble, Le souk de Sefrou. Sur
l'économie du bazar est un texte dont la réception est restée
presque confidentielle, dans le monde anglophone comme
dans le monde francophone. C'est pourtant l'un des
ouvrages de maturité où l'on voit Geertz, déjà célèbre, se
débattre pied à pied avec des données empiriques,
d'archive et de terrain et renouer avec un certain nombre
d'interrogations lancées vingt-cinq ans plus tôt en
Indonésie. C'est aussi le volet d'une enquête collective qui
a collecté et ordonné une somme de connaissances dont
on ne dispose guère sur la plupart des villes de la
périphérie du monde et qui a introduit une perspective
originale dans les recherches sur l'Afrique du Nord et le
Moyen-Orient. Pour le généraliste, c'est une belle étude
de cas en anthropologie économique, à l'intersection
d'une anthropologie sociale et d'une anthropologie
culturelle. Pour le profane, c'est tout simplement une
belle pièce de littérature, où découvrir les ressorts de
l'anarchie des souks orientaux.