L'école et l'écriture obligatoire
L'enseignement de la lecture est jalonné de polémiques et de débats enflammés, au contraire de celui de l'écriture, territoire bien plus calme. Situation paradoxale : tant que les débutants apprennent à lire en apprenant à écrire (tracer des lettres, copier, rédiger), l'écriture est perçue comme un savoir savant, prérogative des clercs et des marchands. Or, cet apprentissage réservé à une élite se trouve séparé de celui de la lecture que l'imprimerie rend accessible au plus grand nombre. Comment s'est inventée la pédagogie de masse qui a rendu d'abord la lecture (de l'imprimé) obligatoire, puis l'écriture obligatoire ? Quelles mutations affectent l'écriture, quand les claviers chassent les stylos ?
Pour comprendre cette histoire et ses enjeux contemporains, Anne-Marie Chartier refait le parcours des écritures scolaires en faisant dialoguer des sources considérables (cahiers de classe, témoignages historiques, souvenirs littéraires). Elle montre comment les maîtres des écoles paroissiales, communales, publiques, confrontés à des situations « impensables » pour la génération d'avant, ont inventé, adapté, transformé la panoplie des procédés hérités pour faire entrer tous les écoliers en écriture.