L'émotion argumentée
Cet ouvrage se propose de formuler une hypothèse originale concernant les rapports qui unissent l'argumentation et les émotions. Située au carrefour de la tradition rhétorique, de la théorie de l'argumentation et des sciences du langage contemporaines, la réflexion entend reprendre à nouveaux frais la question du pathos. L'idée est que l'on ne fait pas seulement appel aux émotions dans le but d'accroître l'efficacité d'une argumentation : les émotions peuvent, dans certains cas, en venir à constituer les objets mêmes de cette argumentation. La première partie du livre défend ainsi l'hypothèse que les émotions comportent une dimension argumentable et développe un modèle d'analyse propre à saisir cette dimension dans la matérialité des discours.
La deuxième partie est consacrée à une étude des débats parlementaires sur l'abolition de la peine de mort qui ont marqué l'histoire de la France contemporaine (1791, 1848, 1908 et 1981). Comment les orateurs de chaque camp s'y prennent-ils pour justifier des émotions comme la peur, la pitié, l'indignation ou la honte ? Comment ces appels à l'émotion évoluent-ils au fil des débats ? L'ouvrage propose un parcours à travers deux siècles d'argumentation pour et contre la peine capitale : il s'arrête sur des prises de parole qui ont durablement marqué l'histoire de la rhétorique politique (celles de Robespierre, Jaurès, Hugo et Badinter notamment).