Nous la proclamions belle et nous l'aimions d'un amour refoulé. Nous l'appelions Mata Hari faute de savoir son vrai nom, à cause d'une photographie qui se trouvait dans un magazine et qui était censée lui ressembler et que je n'ai d'ailleurs aucune raison de supposer elle-même ressemblante. Elle pouvait avoir vingt ans. Elle était venue habiter aux vacances le château des Messieurs Bourdier que les propriétaires louaient pour la saison. Nous ne disions pas «le château» comme les gens de la région, mais «la Maison de la Plante du Songe» sous l'influence d'un romancier chinois, car nous aimions tout exotisme et ne vivions que de frissons cosmiques.