Les arabes et l'art du récit
Fécondité d'un malentendu : alors que les Arabes se considéraient depuis toujours comme « le » peuple poète, les Européens leur ont décerné la palme du récit.
Ainsi, Cervantès attribue la paternité de Don Quichotte à un historien arabe, et Antoine Galland note que Les Mille et Une Nuits « font voir de combien les Arabes surpassent les autres nations en cette sorte de composition ». Ces derniers ne s'en rendront compte que vers le milieu du XIXe siècle, lorsqu'ils constateront l'extraordinaire fortune du livre des Nuits, traduit à partir de Galland dans toutes les langues européennes. Ayant adopté le roman, la nouvelle et le théâtre, formes qui leur étaient jusqu'alors étrangères, ils ont été amenés à reconsidérer leur tradition littéraire. Tout le monde, finalement, a trouvé son compte dans la récupération, la réinterprétation et la revalorisation du corpus narratif ancien. La littérature arabe, régénérée grâce à l' » épreuve de l'étranger », est désormais inséparable de la littérature européenne.