"Je m'en allai à la Bastille, où je n'avais jamais
été ; je me promenai longtemps sur les tours, et je
fis charger le canon, qui était tout pointé du côté de
la ville ; j'en fis mettre du côté de l'eau et du côté du
faubourg pour défendre le bastion... Les troupes
que messieurs les maréchaux de Turenne et de La
Ferté avaient envoyées pour pousser les nôtres
s'avancèrent près de la ville ; l'on tira de la Bastille
deux ou trois volées de canon, comme je l'avais
ordonné lorsque j'en sortis. Cela fit peur. Le canon
avait emporté un rang de cavalerie : sans cela toute
l'infanterie étrangère, la gendarmerie et quelque
cavalerie, qui étaient à l'arrière-garde, auraient été
défaites...
Quand je songeai le soir, et toutes les fois que j'y
songe encore, que j'avais sauvé cette armée, j'avoue
que ce m'était une grande satisfaction et en même
temps un grand étonnement. La joie que je sentis
d'avoir rendu un service si considérable au parti, et
de m'être comportée en cette occasion d'une manière
si peu ordinaire, et qui n'est peut-être jamais arrivée à
personne de ma condition, m'empêcha d'y faire les
réflexions qui se pouvaient faire."