Les fleurs qui poussent en enfer
...à mon avis, c'est une fleur qui a poussé en enfer ; comme bien d'autres fleurs ont poussé ici et là autour de lui, je les ai appelées « Les fleurs qui poussent en enfer ». Je suis convaincu qu'un jour la tempête de la révolution rassemblera toutes ces fleurs dispersées en un lieu central, pour en faire un lieu de fraîcheur. Ce jour-là, le destin de l'enfer changera de route et de la même manière que les océans pétrifiés sont nés d'un tout petit morceau de glace, à partir de ce petit centre notre grand pays opérera ses changements climatiques et la fournaise de l'enfer se muera en un paradis radieux...
Parmi les romanciers des années trente-quarante, Mohammad Massoud, héritier comme tous ceux de sa génération des idées de la révolution constitutionnelle, offre la figure du libertaire et du redresseur de torts. Massoud est un « self-made man ». Issu d'une famille religieuse, traditionnaliste et économiquement défavorisée, il arrive à Téhéran encore adolescent. Les fleurs qui poussent en enfer (1942) est le premier de deux romans autobiographiques qui racontent ce « Printemps de la vie » (1945). Grâce à des talents exceptionnels, Massoud bénéficie d'une formation de journaliste en Europe. En 1941, l'abdication de Reza Shah Pahlavi lui permet de fonder le journal Mard-e Emruz (L'homme moderne) qui sera le journal au plus gros tirage de ces années-là. La jeune génération des romanciers dont Massoud fait partie est célébrée par le Premier Congrès des écrivains d'Iran en 1946. Un an plus tard, Massoud est assassiné devant l'imprimerie de son journal par un activiste communiste. Son franc-parler, ses idées libertaires, le ton acerbe de sa critique sociale en avaient fait l'ennemi de tous les bords. Son oeuvre romanesque mérite d'être relue et reconnue.