Ce livre contient une traduction inédite de l'article sur les groupes et les algèbres de Lie semi-simples
que le mathématicien Hermann Weyl (1885-1955) a publié dans la Mathematische
Zeitschrift en 1925-1926. Cet article constitue l'un des principaux jalons dans l'histoire de la
théorie des groupes de Lie : Weyl y combine deux méthodes distinctes empruntées à Cartan et Hurwitz.
Ce faisant, Weyl démontre le théorème de complète réductibilité (pour toute algèbre de Lie semi-simple)
ainsi que la formule des caractères et de la dimension pour tout groupe de Lie semi-simple.
Cette traduction est accompagnée d'un commentaire exhaustif portant sur les sources, la structure et la
réception de cet article. Il s'agit tout d'abord de savoir comment Weyl s'approprie les travaux respectifs
de Cartan, Frobenius, Hurwitz et Schur. Weyl parvient à les synthétiser dans son article qui frappe par sa
profonde unité. Cette unité prend la forme d'une harmonie polyphonique entre plusieurs méthodes et
domaines des mathématiques.
Le texte de Weyl est ensuite étudié à partir d'une problématique contemporaine en histoire des
mathématiques portant sur les questions de généralité. L'objectif est alors de montrer, à partir d'une
analyse fine d'indices textuels, que le groupe spécial linéaire constitue un exemple paradigmatique
dans cet article : l'étude de ce cas permet à Weyl d'accéder à la théorie générale des algèbres de Lie
(semi-simples).
S'agissant de la réception de cet article, l'auteur revient tout d'abord sur la complexité des échanges
entre Cartan et Weyl au sujet des groupes de Lie à partir de 1925. Il rend ensuite compte de la controverse
qui oppose Weyl à certains algébristes - Noether, van der Waerden, Artin ou encore Hasse - sur les
méthodes de l'algèbre abstraite au début des années 1930. L'auteur aborde enfin le projet de réécriture
de cet article inauguré par Weyl dans son cours consacré aux algèbres de Lie à l'Institute for Advanced
Study (IAS, Princeton) en 1934-1935. Cette étude est fondée sur des documents inédits conservés dans
les archives Weyl à l'ETH de Zürich. Cette réécriture sera prolongée par Jacobson (qui fut le premier
assistant de Weyl à Princeton) et Chevalley qui, en 1946, publie la première partie d'une grande
monographie sur les groupes de Lie et les groupes algébriques. Ce projet de réécriture ne saurait être
décrit indépendamment du cadre institutionnel de l'université de Princeton et de l'IAS.