« Maman, ton fils va mener une attaque [...] mais plutôt que ton fils, c'est en tant que fils de la patrie que je me considérerai alors. »
En octobre 1944, et alors que la guerre est perdue pour le Japon depuis l'année précédente, sont créés les tokubetsu-kōgeki-tai, ou « corps spéciaux d'assaut » : les pilotes qui les composent sont formés pour se précipiter avec leur avion, chargé d'une bombe, sur les navires de guerre américains. Parce qu'elle sait à quel point les échanges épistolaires jouent un rôle essentiel dans la résistance des combattants, l'Armée impériale les incite à écrire des lettres d'adieu et les exhorte à les personnifier en incluant, par exemple, des caractères calligraphiés, parfois même tracés avec leur propre sang.
Après un rappel historique sur leur création, Christian Kessler présente ici près de 100 lettres, poèmes et testaments inédits de kamikazes, traduits avec l'aide d'Émilie Champmont : autant de documents exceptionnels et particulièrement touchants émanant de très jeunes hommes, pour la plupart lettrés, rédigés juste avant leur départ pour leur ultime mission. Accompagnés parfois de phanères (cheveux, ongles) comme autant de reliques, ils sont destinés premièrement à leur famille - après un tri et une forte censure des autorités. Mais pour les kamikazes, les lettres sont aussi et avant tout la matérialisation du difficile renoncement à la vie qu'ils doivent effectuer. Qu'ils soient d'accord ou non avec les ordres venus d'en haut, il leur faut partir en paix avec eux-mêmes et avec leurs proches.
Un recueil unique, poignant et exceptionnel.