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« Dès le départ, le duc de Bordeaux est unique, solitaire et fragile. Il est d’abord l’enfant du martyre, celui de son grand aïeul Henri IV assassiné par Ravaillac en 1610, celui de son oncle Louis XVI bien sûr, et enfin celui de son père également poignardé par le dernier régicide de l’histoire de France. Lourde hérédité, l’hérédité du malheur et de la tristesse. Mais Bordeaux est aussi l’“enfant du miracle”, l’enfant qu’on n’espérait plus sept mois après la mort de son père, le seul à pouvoir continuer la race et permettre à ses partisans de rester dans l’Histoire. Le martyre et le miracle, ces deux fées un peu insolites, vont l’accompagner tout au long de sa vie. À dix ans, le jeune prince s’embarque à Cherbourg avec la famille royale pour un exil qui ne finira qu’à sa mort en 1883. Son grand-père et son oncle ont abdiqué en sa faveur. Il était duc de Bordeaux en quittant la France, il devient en exil le comte de Chambord, en souvenir de la donation du domaine du même nom faite par souscription à sa naissance. Tous les espoirs des royalistes convergent vers lui et l’engouement de ses partisans prend des allures de vœu et de prière. Dès lors, le temps du roi restera celui des rêves et de l’exil. Il n’y aura pas de successeur. Le légitimisme de ses derniers partisans va finir par ressembler étrangement à une politique de la chute. Le “chambordisme” est une sorte de royalisme du désespoir, “dès lors que le principe incarné par un homme doit périr avec lui”. » E. de W.