L’une des caractéristiques majeures de la fin du XXe siècle, dans les sociétés occidentales, aura été la médiatisation de la parole — outre celle, évidente, de l’image. Après plusieurs siècles d’un règne écrasant de l’écrit dans la diffusion des idées, la parole médiatisée (par la télévision, la radio, etc.) est l’outil privilégié d’accès aux informations, aux idées et aux connaissances pour des millions de personnes. Cette révolution dans les usages pose un problème, auquel nous ne sommes pas nécessairement préparés : celui du pouvoir de la parole. Pourquoi une société donnée, dans un contexte donné, donne-t-elle à la parole cette place ? Faut-il croire en une efficacité particulière de cette médiatisation ? Quelles attitudes avoir vis-à-vis de la parole détournée, reprise, véhiculée ? Ces questions, nous nous les posons aujourd’hui chaque fois que nous regardons un journal télévisé, un débat, ou que nous entendons, repris, les propos tenus par une tierce personne. Le présent volume se propose d’enquêter sur quelques-uns des antécédents historiques de cette médiatisation, et de leur poser ces questions contemporaines. Entre l’héritage laissé par l’Antiquité et la fin du XVIIe siècle, siècle de l’éloquence, mais aussi de la popularisation du livre, la parole a fait en effet l’objet de spectaculaires traitements médiés, que ce soit dans le théâtre, l’opéra, l’écriture littéraire, politique ou historique. Les textes qu’on trouvera rassemblés ici sont le fruit d’un séminaire initié en 1999 par la composante « baroque » de l’équipe Marenbar (Moyen Âge, Renaissance, Baroque) de l’université de Montpellier III, prolongé sous la forme de journées d’études. La caractéristique essentielle du séminaire du Marenbar étant son interdisciplinarité, on lira donc ici des contributions issues de la littérature, mais également de la linguistique, de la philosophie, de l’histoire et de la musicologie...