Au coeur du débat actuel sur l'harmonisation européenne des ministères publics, l'auteur pose sous l'angle du droit comparé franco-allemand le problème de l'étouffement d'affaires pénales par le biais de classements sans suite de convenance (pratique qui n'a pas cours en Allemagne).
Eric Mathias, après un historique et une analyse des deux ministères publics, fait des propositions très concrètes d'évolution pour la France
Table des matières
Première partie
Comparaison fonctionnelle : Légalité ou opportunité des poursuites pénales
Titre premier
Histoire de l'antagonisme des principes de poursuite
Chapitre premier
Genèse de l'antagonisme
Section I
L'adoption du principe de légalité en allemagne
Section II
L'adoption du principe de l'opportunité en france
Chapitre II
Fondement de l'antagonisme
Section I
Les modalités des poursuites : monopole du ministère public ou participation de la partie lésée ?
Section II
La qualité des poursuivants
Titre second
Portée de l'antagonisme des principes de poursuite
Chapitre premier
La théorie de l'exception d'opportunité
Section I
L'évolution historique de l'exception d'opportunité
Section II
Le droit positif de l'exception d'opportunité
Chapitre II
La pratique de l'exception d'opportunité
Section I
Du taux des classements prononces
Pour un motif d'opportunité en france
Section II
Du rapport entre les classements prononces pour un motif d'opportunité en france et en allemagne
Seconde partie
Comparaison statutaire : subordination ou indépendance du ministère public
Titre premier
Le principe de subordination hiérarchique
Chapitre premier
La portée du principe de subordination hiérarchique
Section I
La subordination absolue des procureurs allemands :
L'obligation d'obeir aux injonctions du ministre
Section II
La subordination relative des procureurs français :
La faculté de se soustraire aux ordres du ministre
Chapitre II
Les limites du principe de subordination hiérarchique
Section I
Les limites de la subordination hiérarchique en allemagne
Section II
Les limites de la subordination hiérarchique en france
Titre second
La réforme statutaire du ministère public
Chapitre premier
Une solution radicale : L'indépendance du ministère public
Section I
Des modalités d'expression variées
Section II
Le refus de l'indépendance du ministère public
Chapitre II
Une solution pragmatique : Le contrôle juridictionnel des fautes disciplinaires
Ce livre pose sous l'angle du droit comparé la question de l'étouffement en France d'affaires pénales.
Comment expliquer les classements sans suite de convenance politique quand l'impartialité des magistrats du parquet est constitutionnellement proclamée ?
La doctrine a toujours proposé une réponse statutaire. Ces classements commandés par le pouvoir procéderaient de la subordination hiérarchique des procureurs.
L'étude du ministère public en France et en Allemagne suggère une autre explication.
Tandis que le droit français qualifie le procureur de " partie au procès " - et sépare en conséquence les fonctions de poursuite et d'instruction -, le droit allemand récuse cette qualité.
Cette différence essentielle doit interpeller le législateur français : les classements de faveur posent moins une question statutaire (les magistrats du parquet doivent-ils être indépendants du pouvoir ?) que procédurale (un magistrat peut-il être partie au procès ?).
Concilier l'impartialité du parquet et sa dépendance gouvernementale implique certes de réformer son statut, mais suppose surtout de repenser sa vocation. Les procureurs ne représentent personne en particulier. Ils ne suppléent pas les victimes mais s'y substituent au nom de la Nation : ils font partie de l'autorité judiciaire - ce qui justifierait l'abolition du principe de séparation de la poursuite et de l'instruction, l'instauration corrélative d'une séparation de l'enquête et de la poursuite et la création d'un mécanisme de contrôle des classements.
Cette refonte de l'avant- procès traduirait l'abandon d'une conception du ministère public incompatible avec la magistrature qu'il incarne, et, finalement, la mutation définitive du procureur du roi en procureur du droit.