Le comté de Champagne, qui relève depuis le début du XIe siècle du patrimoine de la maison de Blois, s'érige en principauté indépendante en 1152 et devient pour plus d'un siècle l'un des fiefs les plus puissants du royaume de France. Carrefour économique à la rencontre des marchands flamands et italiens, la Champagne a su profiter de cette situation géographique privilégiée pour prendre une part active au commerce médiéval, tandis que la dynastie thibaudienne, influente dans les événements politiques et culturels de son temps, multiplie les alliances matrimoniales judicieuses et réalise son rêve royal en 1234 avec l'accession de Thibaud IV au trône de Navarre.
Adopté par Hugues Ier dans les dernières années du XIe siècle, diffusé progressivement à l'entourage comtal, le sceau participe de la construction de cette principauté et de l'histoire de sa dynastie. Appendu à la charte qu'il valide, réceptacle privilégié des armoiries, il témoigne des stratégies de la représentation mises en place et porte l'image médiatique du prince en Occident et jusqu'à l'Orient des croisades. Plus qu'une simple signalétique, le répertoire héraldique, reproduit sur les sceaux de l'administration, manifeste la puissance comtale et fait naître, dans la conscience collective, le sentiment d'appartenance à la principauté. Un répertoire qui, après l'union de la comtesse Jeanne avec Philippe le Bel en 1284 et le rattachement programmé de son héritage à la France, s'agrégera bientôt à la symbolique capétienne.
À travers un corpus de 273 sceaux, ce travail novateur, le premier consacré à l'étude emblématique d'une grande principauté féodale, redonne vie à la cour de Champagne des XIIe et XIIIe siècles dans une approche globale, tout à la fois sociale, culturelle, juridique et iconographique.