Mohammed Khaïr-Eddine, l'un des grands écrivains marocains de
notre temps, mort prématurément, était poète, romancier, tragédien
et chroniqueur, mais aussi un maître rare et précieux de l'écriture
épistolaire. La présente correspondance, qui comprend une centaine
de lettres, dont quatre-vingt-onze destinées à sa femme Zhor Jendi, des
poèmes et des textes littéraires inédits, des peintures et des dessins,
n'est pas seulement iconoclaste.
Khaïr-Eddine dresse, dans cette correspondance et ces écrits, un
portrait inattendu de l'homme, de ses affects, de ses obsessions, de
son oeuvre et de sa pensée, et relance le débat sur son écriture et ses
convictions.
Ce qui est donné à lire, ici, c'est que Khaïr-Eddine ne jurait ni par la
révolution ni par l'ordre établi ou l'ethnie ; il n'était pas davantage le
guérillero linguistique que l'on disait, mais un écrivain sceptique, un
empiriste transcendantal qui n'a cessé de s'interroger sur les odeurs
de mantèque propres à son territoire existentiel et à chaque époque.