Professeur émérite des universités et spécialiste du dix-huitième siècle, Jacques Proust, d'une manière novatrice, s'attache à « peindre » une Europe réfractée par le prisme japonais, restituant ainsi l'image que les Européens, surtout missionnaires portugais ou commerçants hollandais, ont voulu en donner.
Au fil de cette étude fondée sur de nombreux documents écrits ou iconographiques, on découvre, révélateur des crises scientifiques ou religieuses, un Aristote modelé à l'usage des Japonais par les jésuites portugais, un Érasme tout aussi singulier, un christianisme mâtiné de mythologie bouddhique, des personnalités étonnantes, parmi lesquelles le père Ferreira, jésuite converti au bouddhisme. Dans le domaine artistique, le phénomène joue également : les Japonais fascinés par l'optique et la découverte de la perspective réinventent, en cohérence avec leur art traditionnel, une esthétique qui fait apparaître en retour des potentialités nouvelles aux yeux des Occidentaux.
À travers ce prisme du Japon, l'Occident qui a si longtemps cherché à imposer son modèle se manifeste tout entier dans ses limites. Soulignant les effets bénéfiques de cette confrontation, Jacques Proust nous invite à élargir notre vision. Ainsi peut-être l'histoire des idées pourra-t-elle rompre avec un européocentrisme fallacieux et trompeur.