Dans l’histoire du corps en Occident, une réflexion particulière est accordée à l’invention du corps chrétien. Un corps de chair, qui deviendra dès les débuts du christianisme le lieu privilégié des institutions du pouvoir, des pratiques, des discours et des croyances. D’un côté, « le corps est l’abominable vêtement de l’âme », dit Grégoire le Grand, mais, d’un autre côté, « le corps est le tabernacle du Saint Esprit », écrit saint Paul. À la différence des traditions hellénistiques, platoniciennes surtout et stoïciennes, qui opposent l’âme et le corps et qui ne voient dans le corps qu’une prison de l’âme ou son tombeau, le corps chrétien invente la chair comme un lieu paradoxal de division, de rupture, de chute et en même temps d’unité, de réparation et de salut. L’invention du corps chrétien, c’est l’invention des liens entre le corps et l’histoire, la chair et le temps, pour l’écriture d’une histoire du corps en Occident. Trois thèmes sont au cœur de ce livre : les antinomies de la chair, les apparitions de la chair, les destinées de la chair.