La littérature a toujours été une source de réflexion et
d'inspiration pour les Sciences Humaines, mais elle va bien au-delà.
Avant même la constitution des sciences humaines et sociales, la
littérature a mis en scène l'individu et les passions individuelles, la
société et les passions sociales : que l'on songe au théâtre antique ou à
celui de Shakespeare, aux romans d'apprentissage ou encore au roman
naturaliste et aux grandes fresques sociales du XIXe siècle.
La littérature constitue un domaine de réflexion et de recherche
sur l'homme et le comportement humain au même titre,
mais de façon différente, que les Sciences Humaines. Certains grands
textes littéraires, à divers moments et dans divers états de culture, «secouent
l'entropie des idées reçues», fécondent la pensée des scientifiques
et permettent aux questions qui n'ont pas encore été posées de
l'être. C'est pourquoi se côtoient ici Mme de La Fayette et Laurence
Sterne, Shakespeare et Cervantès, Thomas Hardy et Molière... Au
miroir des Sciences Humaines et des grands thèmes qui les traversent
(les rapports entre nature et culture, l'identité, les rapports personnels
et les rapports sociaux) ces textes donnent la mesure de leur profondeur
et de leur modernité.
Loin d'être seulement une machine à rêver, la littérature se
révèle ainsi une machine à vivre : lorsque, comme dit Yves Bonnefoy,
on «lève les yeux de son livre» pour regarder la «vraie vie», le regard
est aiguisé pour aller au-delà des apparences, la pensée est affûtée : de
quoi vivre avec ferveur ce lot de destin qui nous est échu.