L'opéra de quat'sous est sans conteste l'oeuvre la plus célèbre de Brecht, et aussi la plus subversive. Clochards, prostituées, criminels et policiers véreux tentent de tirer leur épingle du jeu dans cette comédie musicale aiguisée à la lame, en rupture avec l'opérette légère du début du XXe siècle. La musique entêtante de Kurt Weill inspira nombre d'interprètes de jazz, avec de célèbres reprises de la complainte de Mackie, figure de bandit dans l'ombre de Jack l'Éventreur et de Villon, par Louis Armstrong, Ella Fitzgerald ou Frank Sinatra... Un succès international à l'image de la « fièvre de quat'sous » qui s'était emparée de toute l'Europe dès la création.
Cette nouvelle traduction de l'opéra de quat'sous, assortie des commentaires de Brecht, est suivie d'un scénario directement inspiré de la pièce, La Bosse, et d'un essai sur le cinéma, le procès de quat'sous. Brecht y signe un véritable programme d'esthétique politique, à la suite du scandale suscité par le procès qu'il intenta à la société de production, n'ayant pu imposer ses audaces esthétiques. Il fustige la destruction de son oeuvre sur le bûcher du capitalisme, la marchandisation de l'art par l'adaptation commerciale que tourna G. W. Pabst « au service de l'idéologie bourgeoise ».
La pièce est ici présentée dans sa version originelle de 1928, traduite pour la première fois en français, et enrichie d'un important appareil critique donnant à lire l'intégralité des variantes apportées par Brecht en 1931 et 1955. L'occasion de savourer les songs dans une nouvelle version française épousant au plus près la partition de Kurt Weill.