Loth et son Dieu
Marcella de Ulloa ou la Dernière Toile de Vélasquez
Dans ces deux puissantes partitions pour actrices, Howard Barker s'affirme de nouveau comme le dramaturge du détour historique, interrogeant les grandes oeuvres et leurs mystères avec un regard neuf. Ne délivrant aucun message moral ou politique, son théâtre y est d'une radicalité artistique affirmée.
Loth et son Dieu reprend l'épisode biblique de la destruction de Sodome pour en explorer un détail énigmatique : pourquoi la femme de Loth s'attarde-t-elle dans sa fuite pour jeter un dernier regard sur la ville ? Pourquoi un tel châtiment pour ce geste nostalgique ? Que refuse-t-elle de quitter, dans cette ville dépravée, qui puisse valoir plus, à ses yeux, que la vie même ?
Marcella de Ulloa plonge au coeur des Ménines, de Vélasquez, l'un des plus grands chefs-d'oeuvre de l'histoire de la peinture. Barker s'intéresse à la scène cachée que le peintre espagnol est en train d'exécuter. Marcella est une fascinante érudite de 70 ans que tous admirent et recherchent, sauf Vélasquez. Quand ce dernier est contraint par le roi de la peindre nue, il se découvre un tel attrait pour ce corps que révéler son oeuvre pourrait bouleverser l'esthétique et le cours du monde.
Par ces deux textes où la mort et la sensualité se côtoient, Barker demeure le peintre dramatique de la mise en doute des conventions, du mystère et de la violence du désir.