Existe-t-il des ouvriers «écologistes» qui prennent en compte la menace sur l'environnement que représente leur usine? Dans quelle mesure la prévention des risques industriels est-elle minimisée par le chantage à l'emploi, et récupérée ou étouffée par les intérêts politiciens?
À travers archives et entretiens, ce livre se présente comme une quête d'un syndicalisme capable d'affronter ces questions sans faux-semblants. Il est paradoxal que ce parcours se déroule au Japon où le syndicalisme contestataire semblait disparu. En partant d'un procès contre la pollution atmosphérique dans la région de Tokyo, on observe la façon dont le coopérationnisme entre syndicats et patronat a acculé les ouvriers de la sidérurgie touchés par des maladies professionnelles à se rabattre sur le mouvement anti-pollution pour plaider leur cause. Au contraire, à Minamata, le refus du coopérationnisme a conduit une partie des ouvriers de l'usine chimique Chisso à se mobiliser pour les victimes de cette maladie inédite due à l'empoisonnement de la faune marine par des rejets massifs de mercure. Au contact des malades, les ouvriers transforment les revendications traditionnelles du syndicalisme en une critique bouleversante du productivisme. Il s'agit d'un phénomène sans précédent dans l'histoire du mouvement ouvrier; la maladie de Minamata est un point culminant de la pollution industrielle.
La dernière partie, revenant sur la région de Tokyo, présente de nouveaux syndicats qui, s'inspirant des ouvriers de Minamata, ont obtenu des victoires significatives pour la reconnaissance et la prévention des maladies industrielles, redonnant ainsi toute sa légitimité au syndicalisme contestataire.