Le martinisme demeure le fleuron de l'illuminisme
français et européen. La théosophie de Louis-Claude de
Saint-Martin, loin des réductions occultistes, véhicule
deux conceptions de la transmission qui ne s'excluent
nullement mais au contraire s'associent dans la réalité
de l'expérience initiatique. Le martinisme «de Louis-Claude
de Saint-Martin» propose une voie directe, un
accès immédiat à la connaissance parfaite, à la Gnose,
sans autre intermédiaire que le Silence qui fait alors de
l'initié un autre Christ, un Nouvel Homme. Cette Gnose
inscrite dans le Soi, mais non circonscrite au Soi, peut
violenter un appareil psychique non préparé à cette
expérience ultime qui est une mort au monde et une
mort du monde conçu. Les traditions aident à la réception
de l'expérience, essentielle plutôt qu'existentielle,
à son assimilation et à son inscription sage dans l'existence.
Très classiquement, et à l'instar des grands courants
traditionnels, le martinisme, plus largement l'illuminisme,
considère également la Gnose comme un
savoir qui peut être transmis dans la temporalité, à la
fois par des enseignements et par des pratiques.
L'enseignement est organisé autour de principes issus
d'une révélation considérée d'origine divine et dont
nous n'oublierons pas que si elle s'origine dans l'expérience
de l'Être, elle se colore selon le langage et la culture
qui prétendent la véhiculer. Il y a ainsi une transmission
progressive, gradualiste, temporelle et tempérée,
qui passe à travers les mystères, les rites, les arts,
les symboles dont Jacob Boehme nous dit qu'ils sont
«la signature des choses».