Les portraits réunis ici offrirent aux Français, entre le Second Empire et la Première Guerre mondiale, la séduction de leur exotisme dans une abondante production de cartes postales, albums, guides de voyage et autres revues illustrées. Leur reproduction à partir des plaques de verre originales, admirablement conservées, rend justice à leur indéniable splendeur. Elle recentre aussi le regard sur ces femmes anonymes et muettes - algériennes, marocaines, tunisiennes, libanaises, palestiniennes ou égyptiennes - que l'on regroupait fréquemment sous le terme de «mauresques».
Des clichés les plus anciens, qui poursuivent le rêve oriental des peintres, aux «scènes et types» plus tardifs, moins raffinés, cette galerie de portraits est révélatrice de la place assignée aux femmes orientales dans l'imaginaire colonial. Christelle Taraud, en lectrice attentive de ces images, met à nu les stéréotypes qu'elles véhiculent. Elle évoque avec empathie l'univers méconnu de ces modèles qui, partagés entre marginalité et émancipation, osèrent se dévoiler devant les photographes.
Ce qu'expriment aujourd'hui encore ces femmes d'ombre et de lumière, c'est la force d'une présence intacte, un témoignage d'une beauté singulière.