Anecdotique ou survoltée, l'analyse des rapports entre littérature et journalisme et, plus largement, entre culture et médias a longtemps été réservée aux historiens de la presse ou aux théoriciens de la communication. Ces rapports alimentent un nombre croissant de travaux dans le domaine des études littéraires. Objets de langage, les oeuvres étaient enfermées dans leurs propres contours. Voici qu'elles sont de plus en plus envisagées comme les produits de vastes configurations discursives, sociales et techniques, dont les variations à travers l'histoire font aussi varier leur perception et leur interprétation.
Le mot-valise médiamorphoses résume assez bien les choses et la conversion de notre regard sur ces choses. Adhésion des objets culturels à leurs supports. Relation circulaire des uns avec les autres. Mais aussi changements de perspective quant à ces objets, par effet de l'univers médiatique contemporain sur nos schémas de compréhension.
Ces processus sont abordés ici d'un triple point de vue. Point de vue historique, des années 1830 à nos jours : Lamartine, Mallarmé ou Dumas, Le Bon ou Tarde, Gramsci, Benjamin ou McLuhan sont tour à tour convoqués, acteurs autant que témoins des mutations de la sensibilité en régime journalistique puis médiatique. Point de vue analytique, sur des objets divers : de la poésie au roman-feuilleton, de la littérature à la publicité, des débats sur le reportage naissant aux formes journalistiques actuelles, des langages du pouvoir à la rhétorique réactionnaire. Point de vue théorique enfin, articulant esthétique et critique des médias : moyen d'entrevoir, derrière la rationalité des dispositifs et des théories de la communication, les fantasmagories que celle-ci recouvre, entre contrôle des esprits et évasion imaginaire.