Une vie en neuf cahiers.
Les mémoires de Pierre Perrin s'inscrivent dans l'histoire des mentalités. Ces cahiers mêlent l'histoire sociale, politique, religieuse même, et nous renseignent sur la vie d'un personnage à cheval entre deux époques : la fin du second Empire, le début de la Troisième République et la fin du siècle, l'avant 1914, l'entre-deux-guerres et la débâcle de 1940.
L'auteur décrit, surtout avant 1914, une société dure, la lutte pour le syndicalisme naissant, le labeur à 10 heures par jour, une ville, Saint-Étienne, qui se cherche avec son industrie et ses géniaux inventeurs, un cléricalisme arc-bouté contre un anticléricalisme à fleur de combat, les compagnons de Ravachol, et l'antagonisme drapeau rouge contre drapeau rose, la haine des politiciens véreux, la famille, la société, la nostalgie de la montagne rêvée, celle de Haute-Loire (Saint-Jeures) et les frères francs-maçons.
Ces mémoires sont chronologiques depuis la naissance de Pierre Perrin (d'ascendance vellave) à Saint-Étienne le 27 mai 1871. L'enfance, heureuse, se passe en Haute-Loire, à Saint-Jeures. À sa retraite, à 64 ans, l'auteur entreprend de rédiger ses mémoires. Mais ce qu'il écrit de ses années d'enfance, de la fréquentation des milieux libertaires, anticléricaux, populaires, des loges, de l'enseignement, est confronté à ce qu'il croit, maintenant. Il a beaucoup évolué et en est arrivé à basculer dans la croyance et le conservatisme. L'écriture n'échappe pas aux faits enjolivés et aux oublis volontaires, mais ces carnets sont des écrits forts. L'auteur manie souvent l'humour. Ce n'est pas un récit de terroir. C'est une part d'histoire sociale.
Ces mémoires sont parfois accompagnées de commentaires et de notes signés d'Alfred Morel, le neveu de l'auteur, sous la signature de Maurice Dupuy qui nous a transmis les cahiers, de l'éditeur et de Philippe Moret.