Anecdotes, comédies dont Molière est le héros, romans, tableaux, films : la vie et l’œuvre de Molière sont génératrices d’histoires. La tentation de la fiction se manifeste dès les premiers textes qui lui sont consacrés, à commencer par les Nouvelles nouvelles (1663), où Donneau de Visé retrace le parcours fictif d’un auteur dont la réussite est bâtie sur la chance, l’absence de scrupules et les soutiens des « gens de qualité » ou la Vie écrite par Grimarest (1705), « un des plus faux et des plus ennuyeux romans qui aient jamais paru », selon Jean-Baptiste Rousseau. Cette tendance s’accentue aux siècles suivants, où se développe le mythe moliéresque, relayé par les biographes et les critiques, mais aussi par les institutions culturelles, artistiques et scolaires, et où s’opère ce que Nathalie Heinich a appelé une « mise-en-légende » de l’artiste. Recopiées, amplifiées ou au contraire discréditées, minorées, les histoires imaginées par les premiers biographes et commentateurs sont pérennes. Cet ouvrage s’interroge sur le rôle de la fiction dans la réception de Molière, et plus généralement s'attache à éclairer la construction de l'histoire littéraire.