Mort de la clinique
Psychanalyse et Anthropologie critique
Procédures, protocoles, recommandations, traçabilité, evidence based medicine, gestion du risque, mais aussi télémédecine, capteurs, algorithmes, big data, intelligence artificielle, robotisation, transhumanisme, la médecine est envahie par la technoscience, le marché et le management.
Notre système de santé est en crise profonde, tout en étant dans le déni (nous avons encore le meilleur système de santé du monde est-il répété). La crise éclate aussi bien à l'hôpital que dans la médecine de ville et l'accueil des personnes âgées.
Ces crises multiples et simultanées sont le résultat de bien des facteurs, dont la technicisation, la bureaucratisation et la marchandisation. Mais pas seulement : la médecine, dans son projet prométhéen, sécrète par ses excès et ses insuffisances les effets qu'elle redoute, aussi bien dans son organisation que dans ce qu'elle propose (surdiagnostics, surprescriptions, thérapeutiques excessives et souvent dangereuses, thérapeutiques oubliant la personne et l'importance de la relation). Le malade se résume de plus en plus à un ensemble de données numériques qu'une machine pourrait tout aussi bien voire mieux traiter à la place du médecin. La thérapie ciblée des oncologues laisse croire qu'elle s'adresse à la personne, alors qu'elle s'adresse à une configuration particulière de la maladie. La clinique est en coma dépassé... Faut-il l'enterrer sans autre forme de procès ? Une médecine sans clinique est-elle encore humaine ?