«D'abord, ce fut de l'admiration.
Dès les premiers instants, au Saphir, j'ai été saisi par sa grâce d'infante indiquant son bon plaisir : Tu vas bien me lécher, ouh ! ça va être très bon !
Dit sans dureté, d'un ton empreint d'une tendresse triomphale, telle une épousée sûre de sa victoire. Je fus ébloui par sa manière royale de deviner que dévorer sa fibre fondante, comme un chiot mordillant un os en caoutchouc en jappant de joie, était le meilleur moyen de m'exciter intensément. Ce demi-égoïsme divinatoire et accueillant, la prédiction de nos jouissances - car son «ça va être très bon !» me concernait autant qu'elle, et elle le savait -, enrobés dans le sirop orangé de son accent africain, comme si elle me tendait ses mots mêmes à lécher, trempés dans sa voix à la fois sirupeuse et granulée par son timbre éraillé, avec la touche acide, la griotte de son petit cri posé au sommet de sa phrase..., tout cela agit sur mon cerveau à l'instar d'un philtre.
Je fus heureux de ne pas résister à ce ravissement.»
Exploration de l'univers sexuel et pictural du continent ici doublement noir de la femme, le roman de Stéphane Zagdanski se dévore avec une simplicité gourmande.