Montrer les yeux de l'animal comme un miroir non plus métaphorique mais bien concret, dans lequel se reflète l'image de l'environnement et de celui qui regarde, conduit aussi à poser la question de savoir qui nous sommes pour les animaux. Existons-nous à leurs yeux ?
Et comment ? À considérer les nombreuses scènes que le livre fait résonner, il ne fait guère de doute que, dans l'instant passé les yeux dans les yeux avec une bête, être vu est au moins aussi important que voir.
Si on excepte les animaux de compagnie, la présence des bêtes s'est raréfiée dans le quotidien des sociétés occidentales prospères. Or, c'est aussi par leur contact direct que nous nous définissons comme êtres humains, à travers la compréhension de la relation qui nous lie à elles et qui nous différencie. Il devient alors nécessaire d'interroger ce lien intime. Le prisme de la littérature donne à voir une scène présente dans nombre de récits et romans : le moment précieux, parfois infime, parfois prolongé, lors d'une rencontre interespèce où les yeux se croisent. Reposant sur une vaste enquête qui explore le champ littéraire entre la fin du XIXe siècle et notre monde contemporain, cet essai se fait écho de l'empathie qui s'exprime et déclenche auprès du lecteur un engagement fort en faveur des droits des animaux et de l'écologie au sens large.