Pour des centaines de milliers d'Européens qui ont naguère vécu
en Algérie, l'idéalisation du passé s'est transformée en une
«nostalgérie», beau mot chargé de mélancolie. Mais le drame
commence lorsqu'on constate qu'une seule famille politique
française, celle des anciens de l'Organisation armée secrète (OAS)
et de leurs héritiers, l'a malhonnêtement et durablement instrumentalisée.
Non contents d'avoir mené toute une communauté à
l'impasse puis à l'exil, les «ultras» de l'Algérie française ont tenté,
depuis, d'accaparer sa mémoire. Et ils y sont en partie parvenus.
Ces hommes ont fait le choix, à partir de février 1961, d'enclencher
en toute connaissance de cause une incroyable spirale de
violence terroriste, en Algérie comme en France. Alain Ruscio
propose dans ce livre un récit synthétique des racines et de
l'histoire de ce tragique épisode, ainsi que de ses séquelles contemporaines.
Mobilisant un impressionnant corpus documentaire
- dont beaucoup de Mémoires d'anciens de l'OAS -, l'auteur
retrace la dérive de ces officiers à l'idéal patriotique dévoyé,
militants fascisants et petits malfrats transformés en assassins, qui
ont eu l'incroyable prétention de «bloquer l'histoire», comme l'avait
écrit Pierre Nora dès 1961. Enfin, Alain Ruscio explique comment
et pourquoi la mémoire brûlante de ces années de folie meurtrière
travaille toujours, de façon souterraine, la société française.
Ce livre est une précieuse réponse à l'un des derniers
négationnismes que véhicule encore une certaine histoire coloniale
«à la française».