«Si par une soirée tranquille, à ma fenêtre, je pense à de vieux amis tout en
contemplant la lune, et si j'entends les cris du singe, je mouille ma manche de
mes larmes. Lorsque, sur les buissons, je vois des vers luisants, c'est comme
si j'apercevais au loin les feux de pêche de Makishima, et le bruit de la pluie
matinale ressemble bien à celui du vent qui secoue les feuilles des arbres.
Quand j'entends l'appel des faisans, j'ai l'impression d'entendre mon père ou
ma mère, et si je constate que même les cerfs des sommets de la montagne
s'approchent tout près de moi sans crainte, je comprends à quel point je suis
loin du monde. Quand je m'éveille et ranime le feu qui couvait sous la cendre,
j'y vois comme un compagnon fidèle de mes vieux jours. Je ne suis pas dans
une montagne bien terrible ni déserte, mais alors que la simple voix du hibou
suffirait à m'émouvoir, que dire de ces paysages de montagne, infiniment
variés selon les saisons ! Il faut ajouter que l'intérêt d'une pareille vie ne pourrait
que s'accroître encore pour quelqu'un qui approfondirait ses pensées et
essaierait d'acquérir un savoir profond.»
Kamo no Chômei, Notes de ma cabane de moine, 1212.