Né en 1954 à Sarajevo, Emir Kusturica commence son autobiographie par la restitution – à sa manière hachée, truculente et tendre – de sa jeunesse dans les ruelles des quartiers populaires de la ville. Son éducation est un mélange bigarré entre celle de la rue et des amis de toutes origines et de toutes religions et celle transmise par ses parents, pleine de vie, de polémiques, d’amis, de musique. C’est de là que son sens de l’observation trouvera sa source. Puis de la lecture de Tchékhov et sa profusion de petits personnages jusqu’à ce qu’il découvre Amarcord de Fellini qui sera pour son parcours cinématographique « ce qu’a été le Big Bang pour l’Univers ».
Il suivra ses études à Prague et, dès son premier film, Te souviens-tu de Dolly Bell, obtiendra le Lion d’Or de Venise. Ensuite, Papa est en voyage d’affaires l’oblige à affronter le pouvoir – un jour on le traite de renégat, le lendemain de Tzigane. Avec le succès de Cannes, l’Amérique l’accueille à bras ouverts. Suivront Le Temps des Gitans, Arizona Dream – au cours duquel il fera une dépression profonde –, Underground, Chat noir, chat blanc, La vie est un miracle…
Le récit autobiographique de ce grand cinéaste frappe par la multitude des situations évoquées, le foisonnement des personnages, le brio des scènes toujours visuelles, la véracité des dialogues et, surtout, il révèle derrière l’image un peu « déjanté » du personnage et de ses films, un créateur profondément humain, qui réagit de tout son être aux joies et aux malheurs de son pays.
Traduit du serbe par Vladimir Cejovic et Anne Renoue