«Je ne sais quels poèmes me seraient
venus à l'esprit si on avait découvert au
Japon d'autres formes que les dix-sept
syllabes inciviles ou les difficiles kanji
pour contenir le raffinement de l'élégance.
Qu'importe, c'est en connaissance de
cause que je m'adonne sans la moindre
réticence à ce plaisir fin qui me fait oublier
le monde. Et il ne me viendrait pas un seul
instant à l'idée d'éprouver du ressentiment
à l'égard du Japon qui ne possède
pas d'autre forme poétique.» (Sôseki)
Le haïku est en effet l'aboutissement de la
longue évolution de formes littéraires qui
s'ancrent dans la poésie de cour du Japon
ancien. Sous l'impulsion de Bashô, de
Buson, de Issa, Shiki, Santoka et bien
d'autres, le haïku s'est imposé comme un
genre littéraire accessible à tous et à
même de restituer en toute situation, à
chaque instant, la présence d'un univers
qui ne cesse de faire signe et sens.
Le présent recueil propose dans une traduction
nouvelle une sélection de haïku
écrits à la fin du XVIIIe et au début du
XIXe siècles par le «moine laïc Issa du
temple haïkaï» - comme il se définissait
lui-même. Alliant une quête profonde
mais discrète selon la voie du zen à l'observation
concrète, parfois triviale, des
manifestations du quotidien, cette poésie
invite avec émotion et humour au consentement
à l'imprévisible du monde.