«Bien nous placer dans l'axe de
détresse», écrit Péguy, pour
«prendre le mal dans sa pleine
justesse». Porte-parole de la colère,
Péguy n'est-il pas devenu porte-parole
de la plainte, approfondissant
ainsi l'exigence de justice ?
La balance de la justice oscille sans
cesse sous le poids de ce paradoxe :
on exige réparation pour
l'irréparable. Cette oscillation,
Péguy l'a vécue de manière
douloureuse et impatiente. Il a ainsi
suivi un mouvement qui va de
l'utopie à la rédemption en passant
par l'engagement politique.
Militant en première ligne pour la
révision du procès Dreyfus, il a peu
à peu pris la place du juste plutôt
que celle du militant, découvrant
finalement que cette place ne peut
être que celle du vaincu.
Son oeuvre, qui commence en
utopie, se prolonge en polémique
et s'accomplit en poésie
- et même en prière.