« Le fait que personne ne me parle jamais a été plus dur à supporter que toutes les raclées que j’ai prises. » En 2004, Arthur Honneger résumait ainsi la détresse des enfants placés en Suisse : au-delà des négligences et des violences, le pire était encore le sentiment de n’exister pour personne.
Au début des années 2000, les voix des anciens enfants placés ont commencé à émerger d’une chape de silence longtemps entretenue. Grâce à la mobilisation tenace de certains, soutenus par quelques historiennes et journalistes, la thématique de l’enfance placée s’est imposée comme un problème public au niveau national, suscitant de nouvelles recherches historiques ainsi qu’un processus politique de reconnaissance et de réparation.
En proposant une synthèse des travaux récents, cet ouvrage explique comment ces dispositifs de placement ont vu le jour au nom de la protection de l’enfant, tout en conduisant aux dérives dénoncées par les témoins. Il entend contribuer à intégrer cette thématique dans l’histoire nationale et agir en faveur d’une reconnaissance de la mémoire des victimes. C’est aussi l’occasion d’alimenter un regard critique et réflexif sur le risque coercitif propre aux mécanismes d’assistance, hier comme aujourd’hui.