Le titre Poèmes antiques recouvre trois ensembles différents.
En 1845, Leconte de Lisle quitte définitivement l'île Bourbon : l'Ecole Sociétaire (fouriériste) a promis de lui publier un volume de poésie. La promesse ne pourra pas être tenue, mais les poésies qui devaient y prendre place paraissent en 1845, 1846 et 1847 dans La Phalange, revue fouriériste dirigée par le poète. Il est probable que le titre prévu était Hypatie : nous avons reconstitué de façon approximative ce volume dans le premier tome des Oeuvres complètes.
En 1852, paraît un volume intitulé Poèmes antiques (tréma) qui comprend 31 pièces ; 11 sont reprises d'Hypatie, le plus souvent avec des corrections importantes, et surtout avec une préface qui fait sensation, parce qu'il s'agit d'un véritable manifeste et d'un programme d'action poétique dans lequel se reconnaîtront de plus en plus poètes et prosateurs. La nouvelle esthétique prône la désactualisation du propos et entraîne deux conséquences : parution de plusieurs séries d'« études », exercices formels sans rapport avec l'actualité, « antiques » donc, et non actuels ou modernes ; d'assez nombreuses corrections et suppressions dans les pièces antérieurement publiées.
En 1874, paraît une édition dite « définitive » qui comprend 48 pièces. Pour qu'elle le devienne effectivement, il faudra encore l'adjonction d'une pièce et le remplacement du tréma par l'accent grave, ce qui sera fait en 1881. Les transformations par rapport à l'édition précédente sont au nombre de deux : suppression de la préface, texte d'actualité, qui prônait la mise au rebut de celle-ci ; et surtout mise en oeuvre du programme de 1852 : ce fut le travail de l'auteur durant le Second Empire, parallèlement à l'élaboration des Poèmes barbares.
Abstraction faite de la longueur de chacune (de 14 à 992 vers !), des ajouts et des suppressions, 11 pièces étaient publiées fin 1847 ; 20 nouvelles en décembre 1852, 17 nouvelles en 1874 ; la dernière en 1881.
Le but de la présente édition est de donner à lire les textes de la dernière édition, mais en les replaçant dans leur contexte, c'est-à-dire de mettre en évidence la cohérence d'une démarche consciente, construite, jamais achevée.