La position unique de Milad Doueihi dans l'approche de ce qu'on nomme les "humanités numériques" tient d'abord à sa propre extériorité : ce passionné de théologie du monde oriental, ce familier de la poésie contemporaine et de la philosophie antique n'a pas ses racines dans la technique et l'informatique.
Extériorité géographique aussi, arpenteur du vieux monde et du nouveau : qui a assisté une fois à une conférence de Milad Douehi, ces improvisations sans notes, toutes lestées d'Aristote ou de Rousseau et tant d'autres, sait comme il nous fera voyager dans les frontières de notre propre culture. C'est notre statut d'homme, notre curiosité, et au service de quoi on place nos minces savoirs, qu'il vient questionner dans les outils d'aujourd'hui.
Il les décrypte et les décortique dans leurs plus hautes conséquences. On n'entre pas dans l'analyse de la "grande conversion numérique" sans mettre les mains soi-même dans ses rouages. Moteurs de recherche, jeux en réseau, réalité augmentée, le chercheur ouvre la maison-écran et s'y installe avec ses outils.
Mais c'est en tant que philosophe et amoureux de la langue qu'ici on va suivre une des plus riches pensées du numérique aujourd'hui. La constitution des réseaux d'abord, la culture par l'anthologie, et deux chapitres essentiels sur de très, très vieilles notions : l'amitié, l'oubli.
Paru en septembre 2011 aux éditions du Seuil, collection "La librairie du XXIe siècle", ses lecteurs auront plaisir à en disposer au quotidien dans le format numérique. Mais nous devions à cette approche essentielle, à la fois simple et savante, concrète et rêveuse, du "destin numérique" qu'il soit disponible dans le média même qu'il décrit.
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Création epub originale Gwen Catalá.